La prise de conscience de la monté de l’obésité enfantine dans la plupart des pays occidentaux s’accompagne d’une recherche des coupables. Parmi les coupables présumés, la télévision et ses publicités alimentaires à destination des enfants sont souvent citées. Quatre chercheuses, Pascale Ezan (IAE de Rouen), Mathilde Gollety (Université Panthéon-Assas), Nathalie Guichard (Université Paris I Panthéon-Sorbonne) et Valérie Hémar-Nicolas (Université Paris-Sud) montrent que la télévision peut justement aider les enfants à ne pas grossir. A travers une étude menée sur les publicitaires et sur les enfants, les auteurs soulignent que, contrairement, à ce que l’on peut penser, l’information nutritionnelle est très peu perçue par les enfants. Ces derniers sont plus sensibles à des publicités drôles, bien mises en scène et qui leur parlent. Les éléments d’exécution sont plus importants que le message.
Le marketing social à l’épreuve des petits téléspectateurs
De nombreuses recherches prouvent que mettre en avant des arguments très raisonnables pour persuader les enfants de mieux manger ne marche pas. Parmi les écueils à éviter : les publicités idiotes dans lesquelles on « leur parle bébé », les publicités longues, ennuyeuses, abstraites, trop sérieuses, bref trop adultes. Par contre, les publicités utilisant les animaux, la présence d’enfants, l’action, les slogans choc ou la musique peuvent les amener à développer une attitude favorable à l’égard du discours publicitaire.
Ainsi, chez l’enfant, la forme prime sur le fond. Fort de ce constat, les auteurs ont développé une méthodologie originale de recherche permettant de répondre à la question centrale qui occupe aujourd’hui le marketing social : comment communiquer efficacement sur des produits alimentaires auprès des enfants ?
Raconte-moi une histoire ou la confrontation des discours des enfants et des publicitaires
38 messages publicitaires ont été analysés à partir d’une grille répertoriant le lieu et le moment de l’action, la présentation du produit et des acteurs en jeu, les interactions parents-enfants, enfants-enfants, personnages imaginaires, enfant seul…. Ces analyses ont été confrontées aux discours de cinq chefs de publicité (Publicis, BETC-Euro-RSCG et Kids Partner) en charge de budgets alimentaires à destination des enfants. Nous vous incitons à lire la suite de l’article pour découvrir les enseignements de l’étude.
Quelques grandes conclusions s’imposent néanmoins. Enfants et publicitaires ne sont pas toujours d’accord sur ce qu’est une publicité convaincante. Les recommandations des publicitaires sont les suivantes :
- Le publicitaire doit comprendre l’univers de l’enfant. Il doit transformer le brief en éléments narratifs capables de s’intégrer au monde et à l’imaginaire de l’enfant. Ainsi, le discours nutritionnel tel qu’il est souvent présenté ne peut pas convaincre l’enfant. Il est plutôt élaboré à destination des mamans.
- Il en est de même pour la représentation de l’enfance mise en scène dans la publicité comme une période heureuse et idéalisée. Ce levier touche les mères à travers la nostalgie qu’elles éprouvent pour cette période de leur vie.
- Les deux voies de persuasion les plus efficaces restent le bénéfice ludique (le cadeau) et la publicité génératrice d’interactions sociales. Quand la musique ou le slogan de cette dernière devient un gimmick de cour de récréation, la partie est gagnée.
L’enfant pense avec son cœur
Pour l’enfant, seules les publicités qui déclenchent des émotions à travers une histoire sont réellement efficaces. Le fantastique est largement plébiscité comme le fait de mêler des éléments de sa vie quotidienne et du fantastique. Les leviers « enfance idéalisée » et « interactions sociales » se discutent. Les enfants aiment la publicité Kiri parce qu’elle les fait rire. Ils ne la voient pas comme la prochaine blague qu’ils pourront faire à leurs copains. Par contre, comme les publicitaires le soulignent, la représentation idéalisée de l’enfance ne semble pas les concerner et l’enfant comprend très bien que « ça parle un peu aussi aux parents ». L’article se termine sur les facteurs-clés de succès pouvant être appliqués aux communications nutritionnelles car comme dit le proverbe, le plus important n’est-il pas Mens sana in corpore sano ?