Les publicités de recrutement sur les réseaux sociaux gagnent en sophistication, permettant aux employeurs d’intégrer le prénom et la photographie des personnes ciblées. Ces tactiques de personnalisation sont-elles vraiment efficaces pour recruter de nouveaux collaborateurs ?
Alors que la guerre des talents fait rage dans de nombreux pays et secteurs d’activité, les employeurs utilisent de plus en plus les réseaux sociaux, qu’ils soient professionnels (LinkedIn…) ou personnels (Facebook, Twitter, Instagram…), pour diffuser des publicités de recrutement. Parmi les tactiques publicitaires proposées par les LinkedIn et autres réseaux, figure la personnalisation. Celle-ci concerne notamment l’ajout du prénom et/ou de la photographie des personnes ciblées. Si les employeurs sont de plus en plus nombreux à se tourner vers les solutions de personnalisation proposées par les réseaux sociaux, il n’en demeure pas moins que la pertinence de cette démarche publicitaire peut poser question dans le contexte de recrutement de futurs collaborateurs.
En particulier, la mise en avant de leur prénom et de leur image est-elle efficace pour persuader les employés potentiels ? Doit-on systématiquement utiliser le niveau de personnalisation le plus élevé pour communiquer auprès de futurs collaborateurs ? Vaut-il mieux recourir à la personnalisation sur les réseaux sociaux personnels plutôt que professionnels ? La recherche menée par Jean Pfiffelmann et publiée dans le numéro spécial de Décisions Marketing consacré à l’interface entre marketing et ressources humaines permet de répondre à ces trois questions.
En théorie, personnaliser : oui, mais…
En théorie, on sait que les individus, a fortiori sur les réseaux sociaux, préfèrent les informations qui ont un lien avec eux-mêmes. Cette tendance subconsciente des personnes à préférer des choses qui leur ressemblent est un phénomène nommé « égoïsme implicite », comme le rappelle l’auteur de l’article. Or, l’intégration simultanée du prénom et de la photographie génère plus de références à soi que l’intégration du prénom seul ou encore que la non-intégration de ces deux informations personnelles. La personnalisation publicitaire devrait donc être efficace.
Mais cela n’est pas si simple. La personnalisation publicitaire génère également des effets négatifs, notamment de l’intrusion perçue. Etant donné les usages spécifiques de Facebook et de LinkedIn par leurs utilisateurs, on pourrait penser que les publicités de recrutement seront perçues comme davantage intrusives sur Facebook en comparaison de LinkedIn car elles sont moins en lien avec les expériences divertissantes recherchées sur le réseau social personnel.
En pratique, personnaliser : oui, oui !
Pour vérifier quel effet l’emporte, de l’ intrusion perçue ou de la préférence pour un contenu auto-référentiel, l’auteur a mené une expérimentation. Ainsi, 240 participants ont été exposés aléatoirement à une publicité de recrutement publiée soit sur Facebook, soit sur LinkedIn, chaque publicité étant associée à une des trois modalités suivantes : non personnalisée, personnalisée avec le prénom ou personnalisée avec le prénom et la photographie. Bonne nouvelle pour les recruteurs : les résultats montrent que la personnalisation favorise la formation d’une attitude positive vis-à-vis de la publicité, qui augmente en retour l’intention de cliquer sur la publicité, l’intention de poursuivre le processus de recrutement et l’attractivité organisationnelle. Par ailleurs, la personnalisation ne génère pas d’intrusion perçue.
Quelques red flags à surveiller
Cette recherche montre également que les publicités de recrutement peuvent s’avérer plus divertissantes pour les employés potentiels lorsqu’elles sont personnalisées. Mais si ce résultat est valable sur LinkedIn, il ne l’est pas sur Facebook. Puisque les motivations d’usage des réseaux sociaux sont différentes, il est ainsi possible que les utilisateurs ne considèrent pas Facebook comme un réseau social pertinent pour y voir des publicités liées à un emploi.
L’absence d’intrusion perçue doit aussi être analysée de plus près. En effet, une publicité de recrutement est susceptible d’être perçue comme intrusive, car en en informant sur les opportunités de carrière, elle reste relativement éloignée d’une publicité dont l’intention est de vendre un produit. Les recruteurs ont donc intérêt à indiquer clairement qu’ils sont à la recherche d’un futur talent pour éviter le côté intrusif de la publicité.
Au final, si vous voulez attirer des talents, personnalisez ! Mais faites-le vite. En effet, qu’en sera-t-il quand tous les annonceurs proposeront des publicités personnalisées, là où il s’agit encore d’une incongruité aujourd’hui ?